TAF, arrêt B-6921/2018 du 27 mai 2020 – motifs relatifs, risque de confusion admis
Art. 3 al. 1 let. c LPM: La marque «facebook» jouit d’une force distinctive accrue en raison de sa notoriété. La divergence sur la fin du mot et l’usage d’une couleur différente dans la marque attaquée ne suffisent pas à éliminer un risque de confusion indirect.
Le TAF rejette le recours formé par la titulaire de la marque attaquée «Facegirl (fig.)» (CH 712’059) contre la décision admettant partiellement l’opposition fondée sur la marque antérieure «facebook (fig.)» (IR 1’075’094) pour les annuaires téléphoniques (cl. 16), les services de retouches photographiques (cl. 40), les services de photographies (cl. 41) et les services de rencontres par voie informatiques (cl. 45).
La marque attaquée «Facegirl (fig.)» peut rester au registre pour les produits de la classe 10 et les services de la classe 44.
Marque opposante (intimée)
Cl. 45: Services de mise en relation sociale, services de réseaux et de rencontres; fourniture de services sociaux à savoir services de réseaux sociaux dans le domaine du développement personnel, à savoir l’auto-amélioration, l’épanouissement personnel, activités caritatives, philanthropiques, bénévoles, activités de service public et communautaire, et activités humanitaires; information à propos des services de réseaux sociaux dans le domaine du développement personnel, à savoir l’auto-amélioration, l’épanouissement personnel, activités caritatives, philanthropiques, bénévoles, activités de service public et communautaire, et activités humanitaires.
Marque attaquée (recourante)
cl. 10: Poupées érotiques (poupées sexuelles).
c. 16: Annuaires téléphoniques.
cl. 40: Services de retouches photographiques.
cl. 41: Services de photographie; services de photographes.
cl. 44: Services de soins de beauté et de santé fournis par des saunas, salons de beauté, sanatoriums, salons de coiffure et salons de massage; services de salons de beauté; mise à disposition de services de saunas, salons de beauté, salons de coiffure et salons de massage; services de massages; massage; services d’information en matière de massages.
cl. 45: Services de rencontres par voie informatique; services de rencontres amoureuses sur Internet; services de rencontres amoureuses, recherche de partenaires amoureux et socialisation à des fins personnelles sur Internet; services de clubs de rencontres sur Internet; services d’agences de rencontres; mise à disposition d’informations par le biais de sites Web interactifs en ligne dans le domaine des rencontres et dont le but est de favoriser les rencontres entre individus et de nouer des contacts et relations d’amitié; services d’escorte.
Similarité des services en classe 45
Les marques opposées revendiquent en classe 45 des services de mise en relation sociale et des services de rencontre.
En cours de procédure devant le TAF, la recourante, titulaire de la marque attaquée «Facegirl (fig.)», a limité les services de la classe 45 aux services dans le domaine de la prostitution.
Elle espérait ainsi distinguer ses services de ceux de la marque opposante. Selon elle, pour des raisons de réputation, les entreprises ne proposent pas des services de prostitution à côté d’autres services. En outre, ces services seraient destinés à un public particulier.
Le TAF, comme l’IPI, ne partagent pas ce point de vue. Sous la notion services de rencontre revendiqués par la marque opposante, tombe les services de mise en relation sociale de la marque attaquée. La notion de rencontre ne définit pas le type ou la nature de la relation cherchée ou proposée, si bien qu’elle couvre aussi des rencontres dans le domaine de la prostitution. Par ailleurs, l’usage effectif ou envisagé du signe n’est pas relevant dans le cadre de l’examen de la similitude des services. Par conséquent, la limitation introduite par la recourante ne permet d’exclure une similarité entre les services en classe 45.
Similarité des signes
Le TAF retient que les deux marques opposées reposent sur la même construction graphique: un fond rectangulaire foncé sur lequel est imprimé à la manière d’une affiche un élément verbal blanc en caractères gras. Seul le cœur rose de la marque attaqué se démarque de cette construction.
Les différences de couleur du fond (bleu au lieu du noir) et du cœur rose de la marque attaquée ne sont pas suffisantes pour la distinguer suffisamment de la marque opposée.
La similitude entre les marques est également forte en raison de l’élément «face». La deuxième partie du mot (« book » ou « girl ») diffère sur le plan sonore, mais elle contient le même nombre de lettres de sorte que la cadence de la prononciation, fondée sur une structure à deux syllabes, crée une forte analogie entre les signes. L’ensemble de ces éléments amènent le TAF à retenir la similarité des signes.
Recours rejeté et risque de confusion confirmé
Le TAF a déjà reconnu par le passé la force distinctive accrue de la marque opposante en raison de sa notoriété (TAF B-681/2016 du 23 janvier 2018, consid. 9.1.4 – FACEBOOK/Stressbook). Il confirme ici que le terme « facebook » (traduit en français pas «livre du visage») n’appartient pas au domaine public. Le signe pourrait tout au plus être considéré comme légèrement descriptif en lien avec les services en cause dans la mesure où le réseau social en cause consiste essentiellement à se présenter «en tant que visage».
Cependant, dès lors que les personnes peuvent utiliser les services de la marque opposante et présenter leur profil sans révéler leur propre visage, le TAF estime qu’il n’est pas nécessaire d’examiner la signification descriptive et le besoin de libre disposition de la marque opposante.
Le TAF exclut un risque de confusion direct entre les signes opposés. La marque attaquée n’utilise pas les mêmes éléments verbaux ni les mêmes couleurs. Ces différences seront retenues dans le souvenir du public moyen.
Il retient en revanche un risque indirect de confusion, compte tenu du caractère hautement distinctif de la marque opposante, de la similitude des signes et de la similitude des services. Même avec un degré d’attention moyen, on ne peut pas exclure que le public concerné ait l’impression erronée que les offres proposées sous les deux marques opposées proviennent des mêmes entreprises ou d’entreprises liées économiquement.
Le recours est donc rejeté et l’opposition confirmée.