TAF, arrêt B-5806/2017 du 27 juin 2019 – motifs absolus, domaine public
Art. 2 let. a LPM: Un signe n’appartient pas au domaine public, de façon générale, du seul fait qu’il est banal ou trivial. Il faut toujours examiner s’il est banal en lien avec les produits et services revendiqués.
Art. 2 let. a LPM : Le sens du mot « Merci » en lien avec les services revendiqués n’a pas été modifié en raison de la prétendue notoriété de la marque homonyme pour le chocolat, si bien que la récente jurisprudence du TF rendue dans l’affaire « Apple » (ATF 145 III 178) n’est pas applicable en l’espèce.
L’IPI refuse d’étendre à la Suisse la protection du signe « MERCI » (IR 1’243’689) pour des services en classes 35 (services de ventes en ligne), 38 (transmission électronique de messages), 40 (impression de photographiques) et 42 (numérisation et traitement d’images) au motif que le terme est usuel et banal et qu’il appartient au domaine public.
La déposante, l’entreprise allemande August Storck KG, recours au TAF qui confirme le refus et rejette le recours.
Défaut de caractère distinctif
Le TAF précise que le raisonnement de l’IPI, selon lequel il n’est pas nécessaire de faire référence à des produits et services concrets dans le cas d’expressions triviales ou de termes banals, ne peut pas être suivi. Le caractère banal d’un terme et son appartenance au domaine public s’examine toujours en lien avec les produits et services revendiqués.
En l’occurrence, les services revendiqués dans les classes 35, 38, 40 et 42 sont caractérisés par une interaction du client avec le prestataire de services. Les clients fournissent au prestataire des données à des fins de transmission, d’impression et de numérisation. Aux besoins, les clients doivent adapter leurs données. Ces services dépendent donc de la coopération et d’information des clients. Elles ne se limitent pas à un seul processus, mais comprennent plusieurs étapes au cours desquelles le client est contacté et remercié pour sa coopération.
Dans ce contexte, le terme « merci » n’est pas compris par le public comme une référence à une entreprise déterminée, mais comme une expression de courtoisie courante et attendue. Le signe est donc dénué de caractère distinctif originaire en lien avec ces services.
Besoin de libre disposition
Par ailleurs, le remerciement en lien avec les services rendus peut être utilisé à des fins publicitaires. Une entreprise peut en effet afficher publiquement ses remerciements. Cette démarche peut poursuivre le double but marketing, d’une part d’exprimer sa gratitude à sa clientèle pour sa fidélité et, d’autre part, de montrer que ses services sont rendus à la satisfaction de ses clients depuis longtemps. Il s’agit non seulement de fidéliser les clients existants, mais en outre de faire connaître ses mérites à des clients potentiels.
Le mot « merci » est ainsi communément utilisé dans la vie quotidienne et dans les affaires. Il doit donc rester à la libre disposition des concurrents de la recourante, notamment à des fins publicitaires ou marketing.
Jurisprudence « Apple » du TF pas applicable au terme « Merci »
La recourante n’a pas revendiqué l’imposition de son signe. Elle met par contre en avant la renommée de sa marque « Merci » pour le chocolat qui, selon elle, plaide en faveur d’un caractère distinctif originaire de son signe pour les services revendiqués.
Le TAF rappelle qu’on ne peut pas déduire un caractère distinctif originaire, ou l’absence d’un besoin de libre disposition, de la seule renommée de la marque « Merci » pour le chocolat (ATF 143 III 127, consid 3.3.2).
Enfin, le TAF exclut l’application au cas d’espèce de la récente jurisprudence du TF rendue dans l’affaire « Apple » (ATF 145 III 178). Le sens du mot « Merci » en lien avec les services revendiqués n’a pas été modifié en raison de la prétendue notoriété de la marque de chocolat.