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Shavette

TAF, arrêt B-1015/2021 du 31 octobre 2022 – motifs absolus, dégénérescence niée, appartenance au domaine public confirmée

Art. 2 let. a LPM: Une dénomination inventée ne peut pas être considérée comme usuellement utilisée dans un sens générique lorsque seul un petit nombre de fabricants ou de fournisseurs l’utilisent dans quelques cas sur le marché suisse.

Art. 2 let. a LPM: Le signe «Shavette» se comprend sans effort de réflexion comme «petit rasage». Il est donc directement descriptif de la destination des produits rasoirs (y compris les accessoires).

Le TAF rejette le recours formé par la titulaire de l’enregistrement international 1’431’428 («Shavette») contre la décision de l’IPI refusant à ce signe la protection en Suisse pour les rasoirs non électrique ainsi que leurs parties et que pour les contenants et étuis pour rasoirs (cl. 8).

Il estime toutefois que les preuves fournies par l’IPI sont insuffisantes pour démontrer la dégénérescence du terme. Le signe est en revanche directement descriptif de la destination des rasoirs et il appartient au domaine public.

Caractère générique du terme «Shavette» en Suisse

Le terme «Shavette» est une invention de la recourante. Elle l’a enregistré en tant que marque pour des rasoirs et leurs pièces (classe 8) dans les années 80 notamment en Allemagne et dans l’Union européenne. Ce fait n’exclut toutefois pas que le terme puisse acquérir un caractère générique en Suisse.

Les signes dégénérés sont des signes qui, avec le temps, ont perdu leur caractère distinctif, généralement parce qu’ils sont utilisés essentiellement dans un sens descriptif et qu’ils ne renvoient plus à une entreprise individuelle, mais à des produits ou services déterminés (cf. ATF 131 III 121 consid. 4.2 « Smarties »; 114 II 171 consid. 2a « Eile mit Weile »).

Lorsque le signe n’est pas enregistré en tant que marque, son appartenance au domaine public est admise dès qu’un seul cercle de destinataires, par exemple les spécialistes ou le public acheteur, le comprend comme un renvoi générique. Pour les marques enregistrées, en revanche, la dégénérescence doit être très avancée et reconnue comme telle dans l’ensemble des cercles de destinataires. Ce n’est que dans ce cas qu’une perte de protection peut être prononcée et l’appartenance au domaine public admise (ATF 130 III 113 consid. 3.3 « Montessori » ; 114 II 171 précité).

Pour démontrer la dégénérescence du signe en cause, l’IPI a documenté différents sites Internet de fournisseurs suisses en ligne qui utilisent le terme «shavette» comme désignation générique d’un certain type de rasoirs. Le site web francophone de la chaîne de magasins spécialisés «Dipl. Ing. Fust» donne la définition suivante : «La shavette a la forme d’un rasoir droit, mais on peut changer les lames – ce pourquoi elle est souvent appelée rasoir droit avec lames remplaçables» . Quatre fournisseurs en ligne utilisent la désignation générique «shavette» dans leur navigation comme sous-catégorie des rasoirs, rasage ou rasage humide. L’étiquetage des produits de la recourante présente également ces caractéristiques structurelles (Dovo Shavette, Dovo Shavette ébène et Dovo Shavette bois d’olivier). 

Le TAF estime que ces moyens de preuves démontrent de manière crédible que, sur le marché suisse, différents fournisseurs Internet, pour la plupart de petite taille, utilisent le mot «shavette» pour désigner un type de rasoir. Toutefois, seuls quelques fournisseurs intègrent cette désignation dans leur navigation. En outre, mis à part les produits de la recourante, l’IPI ne documente qu’un petit nombre de rasoirs désignés par le terme «shavette». Or, les fournisseurs en question désignent également ces différents produits comme rasoirs (à lame interchangeable), barberettes ou couteaux à lames interchangeables.

Une dénomination inventée ne peut toutefois pas être considérée comme usuellement utilisée dans un sens générique lorsque seul un petit nombre de fabricants ou de fournisseurs l’utilisent dans quelques cas sur le marché suisse.

Caractère descriptif du signe en lien avec les rasoirs

Le terme anglais «shave» (raser) fait partie du vocabulaire de base. Le suffixe -ette, principalement utilisé en français et en anglais, indique le genre féminin et signale un diminutif pour les substantifs et les adjectifs. Le public pertinent recombinera donc ces deux éléments et comprendra «shavette» en relation avec des rasoirs (y compris les accessoires) sans effort de réflexion comme «petit rasage».

Le signe «Shavette» constitue donc une indication directement descriptive de la destination des produits litigieux. Peu importe que le terme ait été inventé par la recourante. Le TAF rejette ainsi le recours.

(TAF arrêt B-1015/2021 du 31 octobre 2022

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