TF, arrêt 4A_492/2022 du 13 mars 2023 – motifs absolus, domaine public, recours rejeté
Art. 2 let. a LPM: Les signes litigieux se comprennent comme une représentation figurative stylisée qui fournit des informations sur la destination et le contenu des produits et services revendiqués, c’est-à-dire comme un pictogramme. Ce type de représentation est usuelle en lien avec les podcasts et programmes y relatifs. Les signes en cause ne s’en distinguent pas.
Le recourante, Apple Inc, conteste la décision du TAF (B343/2022). Cette décision confirmait le refus par l’IPI de protéger le signe ci-contre (IR 1450712 et IR 1425790) en tant que marque en Suisse pour des produits et services en classes 9 et 41 (Software pour diverses fonctions en lien avec les Podcasts) au motif que le signe appartenait au domaine public.
L’IPI avait en revanche admis à la protection les deux enregistrements internationaux pour les services des classes 38 et 42. Le recours ne concerne par ces deux classes.
Dans son arrêt du 23 septembre 2022, le TAF a confirmé la décision de l’IPI. Il a considéré que l’illustration représentait directement le but et la fonction du logiciel d’application de podcast revendiqué en cl. 9 et des services en cl. 41 qui y sont liés. Il a constaté que cette représentation était largement utilisée sur le marché pour des podcasts, raison pour laquelle les acheteurs ne verraient pas (ou plus) dans les signes en cause une indication de l’origine commerciale, mais une description thématique du logiciel installé sur un appareil électronique. Pour cette raison, les signes appartiendraient au domaine public.
Le TF confirme la décision du TAF.
Compréhension du signe par le public cible
Il n’est pas contesté que les produits et services s’adressent à un public qui a l’habitude d’utiliser des appareils électroniques. Il n’est pas rare que les destinataires s’assurent, lors du téléchargement d’un software, qu’il a affaire à l’application effectivement souhaitée. Ces produits et services sont donc acquis avec un degré d’attention légèrement plus élevé que la normale.
Les signes litigieux représentent une personne ou une antenne stylisée, entourée de deux cercles concentriques. Les cercles sont reconnaissables, sans effort d’imagination, comme des ondes radio ou sonores. Le public visé voit dans le signe, sans effort de réflexion particulier, soit une antenne qui émet des signaux acoustiques (ou autres, par exemple électromagnétiques), soit une personne entourée de signaux acoustiques (ou autres, par exemple électromagnétiques). Ainsi, les signes litigieux représentent directement et – du moins pour l’acheteur familiarisé avec les appareils électroniques – de manière facilement compréhensible la fonction et le but d’un podcast typique ou d’un programme de podcast, à savoir la diffusion et la réception de fichiers audio (et plus rarement) vidéo. Les signes transmettent donc une information visuellement abstraite. Ils décrivent la destination et le contenu des produits et des services pour lesquels la protection est revendiquée, à savoir des logiciels d’application de podcast et la mise à disposition de programmes de podcast.
Les signes ne se distinguent pas des pictogrammes usuels de podcast
Le TF ne voit rien d’arbitraire dans l’appréciation faite par le TAF selon laquelle les éléments contenus dans le signe en cause sont utilisés par différents fournisseurs pour indiquer des programmes de podcast. Le TF confirme ainsi que de nos jours, le public perçoit les signes litigieux, dans leur impression d’ensemble, comme des représentations fonctionnelles – éventuellement simplifiées – d’un programme de podcasting, et non comme une référence à une entreprise déterminée.
Les signes litigieux ne se distinguent pas des pictogrammes utilisés pour désigner un podcast ou un progamme de podcasting. En outre, les logiciels d’application sont régulièrement affichés sur l’interface utilisateur d’appareils électroniques tels que les smartphones, les tablettes, etc. sous la forme d’icônes qui servent également de boutons et qui, à des fins d’utilisation intuitive, contiennent une indication thématique sur le contenu de l’application installée. Dans ce contexte et compte tenu des produits et des services revendiqués, le public concerné comprendra les signes litigieux, sans effort de réflexion, comme des indications fonctionnelles et des indications sur le contenu du programme logiciel représenté et des services qui y sont liés, et non comme des signes distinctifs au sens du droit des marques.
La jurisprudence « Butterfly »
La recourante a tenté d’étendre la jurisprudence «Butterfly» (TF 4A_15/2022) à son cas (lequel n’a rien à voir avec la forme des produits revendiqués).
Selon cette jurisprudence, une indication de forme revendiquée pour des produits pouvant potentiellement avoir cette forme n’est refusée à l’enregistrement en tant que marque que si ladite forme est typique dans la catégorie des produits revendiqués. La recourante soutient qu’en application de cette jurisprudence un signe qui, en relation avec les produits et services revendiqués, serait « simplement répandu, mais pas caractéristique et typique », devrait être admis à la protection en tant que marque. Un signe n’appartiendrait au domaine public que s’il est lui-même « communément utilisé et typique ».
Le TF explique qu’il n’a nullement dit que la force distinctive d’un signe ne pouvait être niée que si « la marque litigieuse elle-même » était généralement usuelle et typique. La jurisprudence citée se réfère au caractère usuel de la forme ou de l’emballage désigné par le signe, et non au caractère usuel du signe concrètement revendiqué en tant que tel.
Le recours est ainsi rejeté.